Publié le 17 décembre 2022
Seul maître à bord de Twitter, Elon Musk supprime les comptes de ceux qui lui déplaisent. Furieux de voir les allers-retours de son jet privé traqués par un compte qui utilise des données publiques, il a supprimé le compte “ElonJet” puis ceux de la douzaine de journalistes qui ont raconté cette histoire, créant ainsi une nouvelle controverse planétaire. Les rappels au respect du droit fondamental qu’est la liberté de la presse se multiplient.
Après son jeu de massacre sur le personnel de Twitter dont il a, en une nuit, licencié la moitié des salariés, Elon Musk a une nouvelle cible : les journalistes et ceux qui traquent les mouvements de jets privés. Il a supprimé le compte d’une douzaine de professionnels américains pour crime de lèse-majesté. Ils avaient couvert une information : la suppression par le seul et unique dirigeant de Twitter du compte @ElonJet qui avait 500 000 abonnés. Créé par Jack Sweeney qui utilisait des données publiques pour suivre les incessants voyages du jet privé du milliardaire de la tech, il a été supprimé le 14 décembre tout comme d’autres comptes dédiés au même usage. Mais l’escalade consistant à supprimer les comptes des journalistes qui ont relayé l’information dès le lendemain, a déclenché une violente tempête.
Les décisions arbitraires d’Elon Musk qui consistent à changer les règles de modération en fonction du souhait du dirigeant de la plateforme sont d’autant plus graves que les réseaux sociaux sont devenus des sources d’informations à part entière, sans que les biais algorithmiques selon lesquels ils fonctionnent soient vraiment connus de leurs utilisateurs. La modération selon Elon Musk passant par les sondages auprès de sa communauté préférée, il lui a demandé combien de temps devait durer ces suspensions. Comme une majorité (43 %) lui demandait de les arrêter tout de suite, et que 38 % lui demandait de les prolonger, il a relancé le sondage estimant le résultat confus !
Unsuspend accounts who doxxed my exact location in real-time
— Elon Musk (@elonmusk) December 16, 2022
Reprendre le contrôle démocratique des plateformes
Reporters sans frontières proteste énergiquement contre la dérive de ce réseau social initialement utilisé massivement par les journalistes comme outil de veille sur l’information. Pour l’ONG qui défend la liberté de la presse, “le bannissement de compte de journalistes prouve que l’arbitraire des grandes plateformes est un grand danger pour la démocratie”. Son secrétaire général Christophe Deloire ajoute : “on nage en plein cauchemar kafkaïen. Il y en a assez de l’arbitraire des plateformes, il faut reprendre le contrôle démocratique de ces plateformes avant qu’elles ne soumettent totalement les démocraties à leurs caprices et qu’il ne soit trop tard”.
.@RSF_inter exige le rétablissement immédiat des comptes de journalistes suspendus suite à la nouvelle politique d’@elonmusk. A terme, aux institutions démocratiques d’agir. Le Forum sur l’information et la démocratie a formulé des propositions précises. https://t.co/BJWgBrXEss https://t.co/UQ5qCA95ZZ pic.twitter.com/mBeYtZPPUy
— Christophe Deloire (@cdeloire) December 16, 2022
L’Allemagne a été le premier pays européen à protester énergiquement appelant à des sanctions contre Twitter. Pourtant, il y a neuf mois, Elon Musk célébrait en compagnie d’Olaf Sholtz l’ouverture de la Giga Factory de Tesla près de Berlin, tout sourire. Depuis Tesla a perdu plus de 30 % de sa valeur boursière, Twitter n’est plus coté et Elon Musk est tombé de son piédestal. Il se voit même disputer le titre d’homme le plus riche du monde par Bernard Arnault le milliardaire français qui détient le groupe LVMH. Les temps changent très vite dans l’univers des réseaux sociaux mais Elon Musk finit par donner le tournis à tous ses utilisateurs.
Anne-Catherine Husson-Traore, @AC_HT_, directrice générale de Novethic
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