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Fronde à l’AG de TotalEnergies : un tiers des actionnaires soutiennent une résolution climatique ambitieuse

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AG TotalEnergies

Publié le 26 mai 2023

ENVIRONNEMENT

Si les échauffourées en marge de l’Assemblée générale de TotalEnergies ont particulièrement retenu l’attention, le vote surprise d’une partie des actionnaires laisse à penser que le message des militants commencent à infuser. Environ un tiers d’entre eux ont en effet voté en faveur d’une résolution climatique demandant à TotalEnergies d’être plus ambitieux sur le climat. Ce n’est pas encore une majorité, mais c’est un score inégalé jusqu’à présent au sein des grandes majors européennes. 

L’Assemblée générale de TotalEnergies a finalement bien eu lieu, malgré les centaines de militants qui ont tenté d’en bloquer l’accès, en vain. Mais alors que le débat devait se jouer à l’extérieur, c’est finalement dans l’atmosphère feutrée de la salle Pleyel qu’il a eu lieu avec le vote surprise d’une partie des actionnaires. 30,44%, soit presqu’un tiers d’entre eux, ont validé la résolution climatique déposée par l’ONG Follow This, associée à une coalition de 17 investisseurs internationaux, dont PGGM, La Banque Postale AM, Sycomore AM, Edmond de Rothschild AM Degroof Petercam.

Cette résolution, contre laquelle TotalEnergies avait appelé à voter, demandait à la major d’aligner ces émissions de scope 3, c’est-à-dire celles correspondant notamment à l’utilisation de ses produits, sur l’Accord de Paris à l’horizon 2030. Ce vote démontre “l’augmentation du nombre d’actionnaires qui doutent  de l’efficacité de la stratégie dite climat de TotalEnergies”, réagit Lucie Pinson, fondatrice et directrice de Reclaim Finance. Ce score, qui a surpris nombre d’observateurs, y compris la direction du groupe qui n’a fait aucun commentaire, dépasse celui de 2020 (17%) et ceux obtenus cette année pour des résolutions similaires dans les AG de BP (16,75%) ou encore de Shell (20,19%).

“Le risque à terme est qu’il n’y ait plus d’investisseurs institutionnels au capital de TotalEnergies”

Selon un rapport de Reclaim Finance, TotalEnergies ne prévoit aujourd’hui de baisser que de 2% ses émissions de scope 3 d’ici 2030 et prévoient une production d’hydrocarbures 81% supérieure au niveau nécessaire en 2030 pour s’aligner sur le scénario 1,5°C de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). “Nous ne sommes pas d’accord avec le scénario de l’AIE car nous ne pouvons pas ne pas répondre à la demande de pétrole et gaz. D’autres pays le feraient à notre place”, a expliqué Patrick Pouyanné, le PDG de TotalEnergies devant les actionnaires.

“Ce n’est pas TotalEnergies seul qui peut influencer le choix des clients. Cela doit passer par une action concertée sur la demande. Par ailleurs, si on réduit l’offre, les prix vont s’envoler et ce n’est pas ce que veulent les consommateurs, a-t-il argumenté. Ce n’est pas l’idée que je me fais d’une transition juste. Notre stratégie est de maintenir la production de pétrole dans la décennie et de nous adapter à une baisse prévue aux alentours de 2030. Cela nécessite donc d’investir dans de nouveaux champs pétroliers. Nous assumons également notre stratégie de croissance dans le gaz naturel liquéfié”.

Pour l’entreprise donc, “la résolution proposée serait contraire aux intérêts de la Société, de ses actionnaires et de ses clients”. Une position que ne défendent visiblement pas tous les investisseurs, notamment institutionnels. Pendant l’AG, un représentant du Forum pour l’investissement responsable (FIR) a ainsi pointé le manque d’alignement des investissements de l’entreprise sur la taxonomie européenne (31%) qui prévoit de sortir les entreprises des énergies fossiles qui n’ont pas d’objectif aligné sur une trajectoire 1,5°C. “Le risque à terme est qu’il n’y ait plus d’investisseurs institutionnels au capital de TotalEnergies“, a-t-il prévenu.

Un Say on climate adopté à 89%

Reste que pour l’instant, la majorité des actionnaires soutient la politique climatique de TotalEnergies. Ainsi, le Say on climate du groupe, sa stratégie climat, a été approuvé à 88,76%, un résultat équivalent à celui de l’année 2022. “C’est un très large soutien, je vous remercie“, s’est réjoui Patrick Pouyanné, qui a également vu la résolution d’augmentation de 10 % de sa rémunération adoptée à une large majorité (92,83%). “Alors que les activistes brandissaient des pancartes ‘Total détruit, les banques financent’, la majorité des actionnaires a de nouveau apporté un soutien indéfectible à la major alors que celle-ci s’apprête à développer de nouvelles bombes climatiques”, se désole Lucie Pinson.

Des centaines de militants – 700 selon les organisateurs – étaient effectivement mobilisés dès l’aube, se retrouvant face à un important dispositif policier. Retranchés à quelques dizaines de mètres autour de la salle Pleyel, derrière des barrières mises en place par la police, ils ont obligé passants et actionnaires à faire un détour, et pour les plus tenaces d’entre eux à forcer le barrage avec l’aide de la police, n’hésitant pas à piétiner les activistes. “Pourquoi on ne me laisse pas circuler”, hurle l’une d’entre elles visiblement affolée. “Arrêtez vos conneries ! Comment vous faites rouler votre voiture”, rétorque un autre aux activistes qui appellent à sortir des énergies fossiles. 

Cette action de masse, coordonnée par Alternatiba Paris, les Amis de la Terre France, Attac, et avec le soutien de Greenpeace France, 350.org et Scientifiques en Rébellion, avait pour but de dénoncer les projets dévastateurs de Total et “son greenwashing agressif”. “Avec ce blocage, nous montons d’un cran par rapport aux actions de ces derniers mois et avertissons Total : il n’est plus possible de voter ses plans et de dérouler son greenwashing en toute impunité“, prévient Steven Arfeuille, porte-parole d’Alternatiba Paris.

Concepcion Alvarez

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