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La justice européenne interdit de réautoriser les néonicotinoïdes tueurs d’abeilles : la France au pied du mur

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neonicotinoides abeilles

Publié le 22 janvier 2023

ENVIRONNEMENT

C’est un arrêté de la Cour de Justice européenne qui vient remettre les pendules à l’heure. Non, les États membres ne peuvent pas déroger à l’interdiction des néonicotinoïdes, ces pesticides “tueurs d’abeilles”, interdits depuis 2018 dans l’Union européenne. Or la France comptait bien, pour la troisième année consécutive, prolonger les dérogations d’utilisations pour la filière betterave. Un soulagement pour les associations écologistes. 

C’est un arrêté qui met à mal la politique gouvernementale sur les néonicotinoïdes. La Cour de justice de l’Union européenne a publié un arrêté le 19 janvier dans lequel elle interdit formellement aux États membres de contourner l’interdiction des semences traitées aux néonicotinoïdes. Ces pesticides sont interdits en Europe depuis 2018 en raison de leur toxicité sur les pollinisateurs et l’ensemble du vivant, “documentée par plus de 1 100 publications scientifiques accablantes analysées par un groupe de chercheurs indépendants, la Task Force on Systemic Pesticides”, souligne l’ONG Pollinis. 

Or la France justement a déjà autorisé par deux fois des dérogations pour la filière betterave et s’apprêtait à faire de même pour l’année 2023, remettant en cause le caractère exceptionnel de ces dérogations. Le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a en effet déclaré lors de l’Assemblée générale de la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB) en décembre dernier vouloir “prolonger la dérogation”. Si la France se positionne ainsi c’est que la filière betterave est particulièrement impactée par cette interdiction.

Passage en force 

En 2020, certaines cultures ont ainsi été ravagées par la jaunisse. Les parcelles les plus touchées ont perdu jusqu’à 40 % de leur rendement, mettant la filière à genoux. Sur France Info, Christophe Buisset, vice-président de la chambre d’agriculture de la Somme, s’insurge contre l’arrêt européen : “Comment voulez-vous aller protéger des betteraves contre des pucerons si on n’a pas d’insecticides ? C’est comme soigner la grippe sans vaccin”, a-t-il commenté. La France n’est pas la seule à avoir mis en place des dérogations au sein de l’Union européenne. C’est le cas de la Belgique, qui a délivré six autorisations d’utilisations des néonicotinoïdes, de la Roumanie, l’Allemagne ou encore la Pologne. Or l’arrêté est clair : aucun État membre ne peut déroger aux interdictions de ces pesticides “tueurs d’abeille”. 

Est-ce à dire que le gouvernement français va faire machine arrière ? Pas si sûr. “Il est probable que l’arrêté de réautorisation, bien qu’illégal au regard du droit européen, sera signé, puis que les associations saisiront le Conseil d’État dans la foulée”, indique au journal Le Monde une source proche du dossier. Le passage en force est d’autant plus difficile à accepter pour les associations de défense de l’environnement qu’il rend totalement caduque le rôle du conseil de surveillance créé en 2020 pour encadrer l’usage exceptionnel de ces néonicotinoïdes. Plusieurs organisations membres ont d’ailleurs décidé d’en sortir alors que le ministère de l’Agriculture a annoncé le report de la réunion du conseil prévue le 20 janvier. 

“La fin définitive d’un écocide”

Le Président de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), Allain Bougrain-Dubourg, avait annoncé le boycott de cette réunion pour “ne pas se rendre complice d’une décision contraire au droit”. L’association Agir pour l’environnement (APE) et le syndicat agricole Confédération paysanne sont allés plus loin le 19 janvier en claquant la porte du Conseil de surveillance arguant ne pas vouloir “cautionner plus longtemps une instance qui ne constitue qu’un alibi et ne permet en réalité ni débat loyal et éclairé, ni décisions démocratiques”

En attendant, les opposants aux dérogations se réjouissent. “Il s’agit d’une décision formidable que Générations Futures salue et d’une grande victoire pour les écologistes !”, écrit l’association dans un communiqué. C’est “la fin définitive d’un écocide”, ajoute dans un tweet la députée et ancienne ministre Delphine Batho. Pour rappel, les géants de l’agrochimie Bayer (qui a racheté Monsanto) et Syngenta avaient déposé un recours contre l’Union européenne sur cette question. En mai 2021, la Cour de justice européenne avait tranché et confirmé l’interdiction des néonicotinoïdes concernés. 

Marina Fabre Soundron @fabre_marina

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